La Wallonie de Rudy Demotte :
une gestion à la petite semaine sans vision d’avenir.
par Paul-Henry Gendebien, Président fondateur du R.W.F.
Discours de rentrée politique le 7 septembre 2013 à Daussoulx
La Wallonie en 2013-2014 est et sera confrontée à une triple crise :
– la crise économique et financière générale, qui sévit en Europe, mais qui frappe plus durement les régions faibles et donc la Wallonie ;
– la crise existentielle et institutionnelle de l’État belge, permanente et systémique, plus menaçante que jamais ;
– la crise visiblement profonde d’une Union européenne dépourvue de cap et de vision.
La Wallonie, l’une des régions économiquement les plus fragiles de l’Europe du Nord, doit affronter simultanément ces trois défis. Le gouvernement wallon ne semble pas en avoir conscience, et quand bien même cette conscience existerait-elle, on peut se demander si la région disposerait des moyens pour relever ces défis.
Les quatre partis traditionnels se contentent d’un rôle de figurant : celui de gestionnaire de l’immédiat et d’administrateur du provisoire. Plus significatif encore, il y a la non-réponse de la société wallonne aux grandes interrogations de notre époque. Nous ne voyons pas émerger chez ceux qui se présentent comme une élite intellectuelle, universitaire ou médiatique, une réflexion sur la faillite de l’Europe, sur les excès de la mondialisation, sur les menaces qui pèsent sur l’État Providence, sur l’usure de notre démocratie parlementaire, sur les reculs de la laïcité…
Quant à la pauvreté et à l’insécurité sociale, elles progressent en Wallonie et à Bruxelles, en dépit (ou à cause) des vingt-cinq années de participation socialiste au pouvoir à tous les niveaux.
C’est dans ce contexte que les dirigeants wallons et bruxellois, acculés par le séparatisme flamand acceptent (et risquent encore d’accepter demain) des réformes de l’État à répétition qui vont priver leur région d’une partie de leurs moyens financiers. Ainsi, et plus que jamais, la Wallonie officielle s’apprête à payer cher et vilain sa non-stratégie et son manque d’anticipation.
Le R.W.F., quant à lui, poursuit avec constance et détermination, dans la durée, la lutte inachevée du mouvement wallon pour notre émancipation. Notre responsabilité est considérable. Sur la toile de fond d’une évaporation finale de l’État belge, nous posons la bonne question : quel est le meilleur cadre institutionnel, national et étatique, capable de répondre aux défis qui rongent notre société.
L’échec de la construction européenne n’est pas de bon augure : l’Union européenne ne sera pas une famille de rechange lorsque l’État belge s’effacera devant la montée en puissance de l’État flamand émergent. L’indépendance de la Wallonie, rêve sympathique à première vue, est une illusion sans fondements réels. La Wallonie peut sans aucun doute s‘enorgueillir d’un passé artistique et industriel remarquable ; elle dispose encore de talents et d’atouts à exploiter, mais tout indique qu’elle n’est pas à proprement parler une nation, tout juste une région dépendante, gérée à la très petite semaine (un exemple entre cent : 600.000 euros pour un logo abracadabrantesque et illisible…)
Quand M. Di Rupo était le chef du Gouvernement wallon, on se souvient qu’il imprima une ligne néo-belgiciste à son gouvernement, avec l’approbation de la classe politique wallonne. Après la parenthèse des années 80-90, la Wallonie se rebelgifie…
A vrai dire, la Wallonie actuelle, qui semble se complaire dans l’euphorie monarchiste et footballistique, apparaît comme un assemblage dépourvu de réalité nationale et de volonté étatique.
Mais il y a aussi la cruelle vérité des chiffres : si la Wallonie représente 33 % de la population belge, elle ne « vaut » que 28 % de l’IPP (impôt sur les personnes physiques) belge, 24 % du PIB, 18% des exportations et 16 % de l’impôt sur les sociétés ! La région wallonne, c’est aussi une dette publique colossale qui en cas d‘indépendance et de succession d’État, atteindrait les 140 % de son PIB, l’équivalent d’une petite Grèce du Nord.
Quant au Wallo-Brux, une invention bruxelloise, il n’est pas plus viable. L’Etat Wallonie-Bruxelles ne serait qu’un résidu de la nostalgie belgiciste, affublé de surcroît d’une monarchie d’opérette. Cet État croupion est d’ailleurs rejeté par la bourgeoisie bruxelloise qui préfère pratiquer la fuite en avant européiste, quand ce n‘est pas la collaboration avec les intérêts économiques et culturels flamands. Cet État croupion serait encore plus ingérable que l’État belge, et serait incapable de perpétuer l’État Providence. On serait devant un État confetti « petit-belge », impuissant à gérer deux territoires non limitrophes, aux frontières contestées et conflictuelles.
Légitimement, les Wallons et les Bruxellois sont inquiets. Malgré la poudre aux yeux qu’on leur jette en permanence, ils pressentent que l’avenir belge est plus incertain que jamais. Ils redoutent le scrutin de 2014. À cet égard, un sondage a montré que 60 % d’entre eux ont peur des prochaines élections ». Ils devinent l’échec institutionnel de M. Di Rupo et consorts.
La classe politique officielle s’est donné trois missions principales : accomplir pendant la présente législature:
– la réforme de l’État ;
– l’assainissement des finances publiques ;
– le redressement wallon.
Le moins qu’on puisse constater, c’est qu’il ne s’agit pas d’un succès.
Réforme de l’État :
– Pourra-t-on l’appliquer effectivement après le 25 mai 2014, surtout si une nouvelle majorité apparaît ?
– Elle est coûteuse pour la Wallonie ;
– Elle ne règle pas la question de Bruxelles ;
– Elle est frustrante pour la Flandre.
Finances Publiques : La dette publique belge totale a augmenté de 30 milliards d’euros (mille deux cents milliards de FB !) en 4 ans. Elle place l’État belge en 13éme position sur 17 États membres de la zone euro : il n’est devancé que par la Grèce, le Portugal, l’Italie et l’Irlande…
Au cours du dernier semestre, ladite dette belge s’est accrue de 4,7 %, atteignant le score inquiétant de 104,5 % par rapport au PIB.
Redressement wallon :
Au-delà d’améliorations sectorielles ou locales, la désindustrialisation des vieux bassins wallons se poursuit. Le chômage wallon reprend de l’ampleur et se situe à un taux deux fois supérieur à celui de la Flandre. Les niveaux de faillites d’entreprises, d’endettement et de pauvreté des particuliers atteignent des sommets. Mais c’est le moment pour M. Magnette d’organiser la chasse aux mendiants dans les rues de Charleroi…
Le parti unique wallon PSMRCDHECOLO va crier victoire à l’approche des élections. Leur mauvaise pièce va recommencer, avec les mêmes acteurs médiocres et bégayants.
M. Di Rupo et ses complices libéraux et catholiques vont tout à la fois vanter l’œuvre « gigantesque » accomplie tout en se déchirant pour la galerie. Les malheureux médias ne sauront bientôt plus à quel sein se vouer.
Le régime belge a peur. Il aura de plus en plus peur à l’approche du jour des élections, le 25 mai 2015. Dans les prochains mois, on verra la surenchère flamingante croître et embellir. Déjà on se rend compte qu’il est vain de « redresser » – en fait de tripoter – les sondages en faveur de la NVA.
Cela dit, qu’a cela ne tienne, la fin justifiant les moyens, le régime construit un discours lénifiant et naïf destiné à édifier et à rassurer l’électorat wallon et bruxellois.
Que nous disent les partis de pouvoir et les médias qui les soutiennent :
En substance, leur constat est triple :
– C’est pire ailleurs et grâce à nous c’est « moins pire » ;
– Le roi et le foot sauveront la Belgique ;
– Le nationalisme flamand ne gagnera pas.
Il s’agit de cacher la vérité : à savoir qu’en termes de taux de croissance, de dette publique et de chômage (Wallonie et Bruxelles), nous sommes plus mal lotis que tous nos voisins !
La monarchie ? On sait que c’est l’État belge qui en constitue le socle et non l’inverse. Quant au football, souvenons-nous seulement des équipes tchécoslovaque et yougoslave qui étaient adulées à Prague et à Belgrade à la veille des dislocations des années 1990.
Quant à la NVA, les Francophones font une fois de plus un mauvais calcul. On la diabolise, tout en n’excluant pas de gouverner avec elle. On table aussi sur sa décrue électorale et on veut croire que le nationalisme n’existe pas au sein des « partis flamands modérés »… Il n’y a pas si longtemps, on nous disait que la Volksunie, et ensuite le Vlaams Blok , allaient disparaître pour de bon, ce qui sauverait la Belgique de bon papa.
On le voit bien : cette propagande simpliste, typique des fins de régime, veut seulement rassurer, gagner du temps, retarder l’heure des comptes. Mais ce n’est pas ainsi que l’on donne rendez-vous à l’Histoire. Ce n’est pas ainsi que l’on conjurera le malheur wallon et que l’on construira un nouveau projet qui permettra aux Wallons et aux Bruxellois de surmonter l’évaporation belge.
L’échec du fédéralisme belge se confirme et se précise. On le saura mieux encore demain lorsque les partis séparatistes flamands (sans compter les séparatistes masqués ou honteux des partis traditionnels) disposeront de la majorité des sièges flamands.
Les Wallons et les Bruxellois devront dès lors choisir : ou bien mettre une fois de plus un genou en terre ou bien se tenir debout et maîtriser enfin leur propre destin.