Albert II a beau dire qu’il écrit lui-même son discours du 21 juillet, à bonne source, le R.W.F. sait que l’intervention qui fustigeait il y a quelques années le « séparatisme feutré » n’était pas de sa main.
Le 21 juillet dernier, conseillé par son entourage, le roi a mis en garde ses sujets contre le populisme, un concept des plus vagues en politique, qui peut se résumer à quelques mots : un parti prétend, à tort ou à raison, parler au nom du peuple pour défendre ses intérêts fondamentaux tout en décriant une élite, en l’occurrence, pour la N-VA, la monarchie belge perçue comme francophone, les responsables de la mauvaise gestion de la Wallonie, la toute-puissance du Parti Socialiste. On le voit, pas de quoi fouetter un lion, fût-il des Flandres.
Cette intervention du roi dans les affaires intérieures du nord du pays a été très mal perçue à en juger par les courriers des lecteurs des grands quotidiens flamands. Pour de nombreux intervenants, Albert II a définitivement perdu son aura d’impartialité, de roi au-dessus de la mêlée. Il a choisi son camp : les francophones, la Wallonie et son ami Di Rupo contre la majorité politique de la Flandre (N-VA, Belang et de nombreux séparatistes cryptés des partis traditionnels) et son héros Bart De Wever.
La mise en scène de la signature de BHV au Palais de Laeken a également suscité de nombreuses réactions négatives. La Flandre politique avait misé au début des années 2000 sur une scission unilatérale et sans conditions de l’arrondissement controversé. Mais aujourd’hui, les rares concessions accordées aux francophones, comme le dédoublement de l’arrondissement judiciaire de BHV, fait enrager le Flamand moyen qui, nous l’avons déjà dit, est extrêmement politisé. De plus, la scission biaisée de BHV a été votée par un gouvernement qui n’a pas la majorité en Flandre et dont le grand vainqueur des élections 2010, De Wever et la N-VA, s’est senti exclu, à tort ou à raison.
Deuxièmement, suite à la réprobation par la presse de l’arrivée en nombre de membres du Vlaams Belang à la N-VA, Peter De Roover, Secrétaire politique du Mouvement populaire flamand (VVB), expliquait récemment que : « En Flandre, une image de vilain petit canard rapporte beaucoup de voix. »
Enfin, le Standaard a relancé son Belgometer. Sur 50.000 participants (!) qui ont répondu à des questions très pointues quant à leur vision de l’avenir de l’Etat belge et de la Flandre, on découvre qu’une majorité de Flamands (52,5%) est plus ou moins séparatiste (la question posée par le Standaard contient le mot épouvantail « séparatisme » en toutes lettres)… 78% des électeurs du Belang et 70% de la N-VA se déclarent séparatistes.
Le CD&V se trouve au milieu du gué : leurs électeurs hésitent entre confédéralisme et séparatisme. Le VLD, quant à lui, est très légèrement unitariste : évidemment, il y a de quoi se poser des questions sur la loyauté du VLD si l’on tient compte de la présence en son sein de Bart Somers, Marino Keulen et autres Jaak Gabriëls !
Pour le R.W.F., la pire des configurations consisterait en une Belgique « coquille vide » avec un protectorat de la Flandre sur Bruxelles et sur une Wallonie exsangues financièrement suite à l’arrêt des transferts financiers et à la régionalisation de nombreuses matières fédérales sans accompagnement de moyens financiers adéquats.