Christophe Deborsu, le Wallon de service sur les chaînes flamandes, quitte ces jours-ci la RTBF pour VT4.
Il semble avoir livré son testament « politique » au Laatste Nieuws le 14 mars dernier. Pour lui, Elio Di Rupo est devenu une sorte d’intouchable que les médias francophones n’osent pas critiquer.
Pendant ce temps, Bart De Wever engrange les voix des mécontents qui ne se retrouvent nullement dans un gouvernement où la Flandre est minorisée et qui est dirigé par un socialiste wallon quasi unilingue…
Voici la traduction libre de sa tribune publiée par le Laatste Nieuws.
Saint Elio
Osons le dire. Il est branché. Il est svelte. Poli, intelligent et bien habillé. Il est homo. Fils d’immigré, il a connu la misère. Il est authentique. Il ne peut pas être soupçonné de ne pas être ouvert au monde ou de prendre la pose. Et il est le premier Premier ministre francophone depuis Leburton. Rien d’étonnant à ce que toute la Wallonie soit fière d’Elio Di Rupo. Grâce à ce qu’il est et et à ce qu’il fait, toute une région a retrouvé sa fierté. Sa « success story » réchauffe le cœur de chaque Wallon. Je n’exagère pas : chez nous, c’est pour le moment la Saint Elio.
Le fait qu’il n’y ait pas la moindre opposition en Belgique francophone l’aide naturellement.
Même chez Ecolo, qui se trouve dans l’opposition au Fédéral, mais qui est à tous les autres niveaux de pouvoir un partenaire du PS. On n’entend aucune critique sur Di Rupo. Pas un mot. Jusqu’à présent, il n’y a pas beaucoup de raisons. Elio engrange les accords. Sur BHV. Sur le budget. Sur la réforme de l’emploi, les pensions et l’énergie. Et si les Wallons bronchent sur la réforme des retraites, c’est Van Quickenborne qui encaisse, pas Di Rupo.
En bref, tout semble lui réussir ces derniers temps. Et cette situation va à l’encontre de ce qui lui est reproché en Flandre : qu’il possède l’art de reporter sans cesse les dossiers. Après 100 jours, la moisson n’est pourtant pas mince.
Mais cette admiration béate pour Saint Elio possède aussi un revers de la médaille. De nombreuses personnes ont peur de lui. Les opposants, mais aussi des membres de son propre entourage.
Peur de parler contre lui. Peur d’être critique.
Jamais un homme politique wallon n’a eu plus de pouvoir qu’Elio Di Rupo aujourd’hui.
D’ailleurs, l’homme en rayonne de bonheur.
Il se comporte comme un homme d’État intouchable, se promène rue de la Loi et dans les venelles d’alentour avec une allure quasi présidentielle. Oui, même au Carnaval de Binche !
On le voit à ses interventions. Vanackere ou Van Quickenborne parlent constamment des gens. Di Rupo parle toujours des « citoyens » (« burgers » ou « burkers » comme il le prononce).
Subsiste un question – et je ne suis pas le seul à me la poser – est-ce la meilleure option pour ce pays d’avoir un Premier ministre wallon ?
De plus, un Premier ministre qui conduit du côté francophone un « A-Team », une équipe de rêve, avec des divas comme Onkelinx ou Reynders, Milquet et Magnette ? Je ne prétends pas que la Flandre a proposé son B-Team, son équipe B, mais quand même.
Ainsi, il est vraiment très facile pour Bart De Wever de tirer sur le gouvernement Di Rupo et de faire comme si la wallonisation de la Flandre était proche, ce qui n’est pas un compliment dans sa bouche.
De Wever aime bien cette image d’un gouvernement « d’ultragauche » en place, alors que le PS s’est en réalité mué en un parti social-démocrate, et même en un parti du centre.
Pour le moment, tout ceci ne semble pas toucher Elio Di Rupo. Il se trouve dans un état de grâce.
Mais tout homme politique le sait bien : cela ne peut pas durer éternellement.