L’intégralité du discours de clôture du Congrès statutaire du 17 mars 2012
Paul-Henry Gendebien, Président fondateur du R.W.F.
Notre chemin est long et rocailleux, mais il en vaut la peine. Notre projet de réunion à la France est bon pour la Wallonie et pour Bruxelles. Il est juste, il est salutaire !
C’est un projet qui nous porte vers le haut, qui nous élève, qui nous fortifie.
Jamais nous n’avons désespéré, jamais nous n’avons renoncé : le cap a été tenu !
Bien sûr, nous avons connu quelques tentatives de déstabilisation : elles ont toutes échoué… Et nous avons même constaté des infiltrations par des mouchards de la police : ils ont été démasqués.
Il n’y a là qu’anecdotes insignifiantes. L’essentiel est ailleurs.
L’essentiel, c’est d’abord que notre Rassemblement ait réussi à s’inscrire dans la durée.
L’essentiel, c’est que la réunion à la France apparaisse de plus en plus comme une réponse plausible, logique, raisonnable à la crise existentielle belge.
L’essentiel, c’est que notre Rassemblement demeure bien ce qu’il est, à savoir un parti démocratique, social, pluraliste, avec une pensée politique, une stratégie et un comportement crédible.
Ce qui compte aussi, c’est que nous préservions entre nous une cohésion forte et inébranlable en face d’un adversaire qui ne nous fera pas de cadeau, un adversaire qui n’est pas un enfant de chœur, même s’il est dépourvu de grandeur et de vision.
Dans tout combat, il faut pouvoir identifier et désigner son adversaire et c’est l’État belge, l’État belgo-flamand.
Aujourd’hui encore, trop de Wallons et de Bruxellois se contentent d’une posture antiflamande, sans plus. C’est un peu court. Ce n’est qu’une posture et elle ne suffit pas.
Il faut aussi une ligne et une stratégie.
Quelle est notre analyse ?
Le nationalisme flamand est bien sûr l’adversaire immédiat et le plus visible.
Mais derrière lui se tient un État belge impuissant à lui opposer un contre-feu, et plus encore un État belge complaisant et complice du séparatisme flamand
A nos yeux, l’État belge est et reste une construction hostile à nos intérêts.
Cela dit, nous ne sommes pas pour autant des alliés objectifs du mouvement flamand ouvertement nationaliste, sectaire et populiste.
Et nous condamnons bien entendu les autorités flamandes dans leur volonté d’épuration culturelle, dans leur incitation à la dénonciation, dans leur volonté de mettre la main sur Bruxelles ou de faire de la Wallonie un protectorat.
Nous sommes étrangers au nationalisme, au fanatisme, à l’extrémisme.
C’est pourquoi nous proposons à la Flandre une négociation civilisée qui mettra fin à notre mariage forcé, une séparation à l’amiable comme le firent les Tchèques et les Slovaques en 1992.
Aujourd’hui, le système belge a peur.
Les partis officiels ont peur.
Les médias à leur service ont peur.
Le Palais Royal a peur.
Ils ont tous peur de perdre ce que vous savez, de perdre la rente et les privilèges du pouvoir belge.
Mais ce système belge a tout de même une grande expertise, celle d’acheter la soumission wallonne et bruxelloise en échange de portefeuilles ministériels.
Il y a tout juste une petite condition : exécuter les volontés flamandes.
Cela ne portera pas bonheur à ces Messieurs-Dames, car il y a une chose que le régime belge ne réussira pas à acheter ni à éradiquer et c’est le nationalisme flamand !
En 2014, au plus tard, la N-VA et le Vlaams Belang, majoritaires en Flandre, disposeront d’un droit de vie et de mort sur l’État belge.
En 2014, au plus tard, sonnera l’heure de l’échec du gouvernement Di Rupo-Reynders-Milquet.
A vrai dire, il a déjà échoué, car il est le gouvernement de toutes les peurs, de toutes les contradictions, de tous les faux-fuyants.
Le seul ciment du gouvernement Di Rupo, c’est la crainte de la N-VA, mais ce ciment ne tiendra pas longtemps du côté flamand.
Ce sera bientôt « Règlement de comptes à O.K. Corral ! »
On voit bien que ce gouvernement est impuissant face à la crise. Il n’a ni vision, ni élan, ni volonté, sinon la pratique de l’austérité à outrance au détriment de la croissance et de la relance. S’il a une volonté, c’est celle de taxer les petits et moyens revenus au détriment du travail et de l’épargne.
Quant à la lutte contre le séparatisme flamand, là aussi ce sera l’échec de M. Di Rupo.
Avec son hystérie munichoise, la presse a essayé de nous faire croire que la Belgique était sauvée pour 1.000 ans. Elle se trompe et veut nous tromper !
La seule vérité, c’est que la paix communautaire n’est pas rétablie. Et elle ne se rétablira pas parce qu’elle n’intéresse pas la Flandre, et tout simplement parce que le conflit de nationalités est consubstantiel à l’existence même de la Belgique.
Rien de fondamental n’a été réglé par les accords de 2011
Les barils de poudre n’ont pas été enlevés !
La périphérie a été sacrifiée mais demeure explosive.
Bruxelles reste enfermée en Flandre et privée de continuité avec la Wallonie.
La Wallonie, financièrement au bout du rouleau, s’appauvrira encore plus avec les transferts de compétences insuffisamment accompagnés de moyens financiers.
Et n’oublions pas que la crise et l’austérité pénaliseront d’abord les régions économiquement fragiles et donc la Wallonie en premier lieu.
Comme toujours, pour la Flandre, la nouvelle réforme de l’État donnera un appel d’air pour la réforme suivante, car les frustrations et les revendications flamandes sont toujours là !
La Flandre n’en aura jamais assez. Elle exigera toujours plus !
Déjà, M. Peeters réclame la régionalisation de l’impôt sur les sociétés.
Pour gagner du temps, les 4 partis francophones ont jeté un os à ronger à l’ogre nationaliste flamingant, avec l’espoir fou de l’amadouer et de sauver la Belgique.
Ils ne sauveront rien du tout ! Car l’ogre flamingant n’est pas rassasié.
M. Di Rupo, sachez-le : un jour, c’est vous et vos ministres qui passerez à la casserole des séparatistes de la N-VA, c’est vous qui deviendrez l’os à ronger.
Ayez au moins le courage de voir et de dire la vérité : autrefois la Wallonie était viable et longtemps elle a entretenu toute la Belgique. Mais le fédéralisme belge et l’incapacité des élites wallonnes à gouverner ont tué cette viabilité. Aujourd’hui, une Wallonie indépendante est une illusion. Elle n’est plus viable toute seule. Lanterne rouge de l’Europe de l’Ouest, la Wallonie n’en finit pas de perdre la course de vitesse entre son propre redressement et l’impatience flamande.
La Wallonie continue d’être sous-gérée et sous-administrée par un parti dominant, totalement dominant, à la barre sans interruption depuis 1988, soit 24 ans. Mais il est là avec la complicité active et intéressée des 3 autres partis…
Leurs moyens d’action pour redresser la Wallonie sont à la hauteur de leur vision, c’est-à-dire médiocres.
C’est vrai : Liège bénéficiera d’un demi-tram…
C’est vrai : Louvain-la-Neuve héritera d’un quart de Centre sportif de haut niveau, sous la forme d’un hangar amélioré.
C’est vrai : Charleroi restera enclavée dans un nœud routier qui a tout l’air d’un nœud de vipères, coupé des débouchés vers Valenciennes et vers Reims.
C’est vrai aussi : Couvin attendra l’achèvement de son contournement, et celui de la route Charlemagne, commencée il y a… 40 ans.
C’est vrai encore : le RER du Brabant wallon risque d’être inauguré aux calendes grecques. Et ainsi de suite.
Merci M. Demotte, Merci M. Antoine, Merci M. Nollet.
Pauvre Wallonie !
C’est d’abord elle qui va payer la crise, l’austérité pour l’austérité, le clientélisme, la politisation de l’administration, sans oublier les insuffisances de l’Europe.
Et pourtant les potentialités, les atouts, les talents de la Wallonie existent !
Mais ils ont besoin d’un cadre politique structurant et stimulant. Ce cadre, c’est celui de la solidarité française qui a montré son efficacité (voyez Lille et Valenciennes).
Cela dit, dans l’immédiat et sans attendre, la Wallonie pourrait et devrait déjà assainir ses structures politico-administratives.
Dès maintenant, il faut qu’elle mette à profit le temps qui reste pour améliorer ses résultats et son image, afin de faciliter le futur mariage France-Wallonie.
Nous avons à cet égard un programme à proposer aux citoyens wallons.
Il sera prochainement repris en détails dans un dépliant actualisé dont vous disposerez sous peu, en vue de la prochaine campagne électorale.
Oui, nous dirons comment remettre toute la Wallonie au travail.
Il faudra viser à l’essentiel d’abord, c’est-à-dire à la réindustrialisation de notre région et à la recréation d’une culture du travail, de l’initiative, de la performance.
Il faudra exonérer les petites entreprises des cotisations sociales ; relever de 30% en 5 ans les bas salaires ; lier les aides publiques à la création d’emplois ; insérer les jeunes dans la vie active par un service civique ; multiplier les crèches pour faciliter le travail des femmes ; préserver nos Services publics (Poste, Chemins de fer, etc.)
Oui, nous dirons aussi que l’enseignement, chez nous, doit être requalifié ; que le statut des enseignants doit être moralement et matériellement revalorisé ; que l’école doit renouer avec ses missions essentielles, à savoir transmettre les connaissances, préparer à la vie active, refonder le respect et le civisme.
Oui, il faudrait aussi repenser l’aménagement territorial, rendre nos villes habitables, éviter la déstructuration de nos campagnes, construire rapidement 3 fois plus de logements sociaux.
Oui, il s’impose de revitaliser la démocratie wallonne, déliquescente, abîmée et corrompue par la particratie omnipotente. Ici également, nous faisons des propositions précises, telles que :
- moderniser la façon de voter ; un député à élire par territoire, à élire au scrutin majoritaire à deux tours ;
- permettre le débat et l’alternance en faisant élire le Ministre président wallon directement par les citoyens ;
- créer une Cour régionale des Comptes pour surveiller les dépenses de nos pouvoirs publics ;
- envoyer chaque année des fonctionnaires wallons sélectionnés à l’ENA (École normale d’Administration de haut niveau).
- dépolitiser la RTBF et la soustraire enfin à l’influence scandaleuse des grands partis et du pouvoir exécutif, etc.
Enfin, nous dirons que nous voulons une Europe qui agit et qui protège nos économies et nos citoyens.
Une Europe qui cesserait d’être bureaucratique et technocratique, une Europe qui cesserait de se méfier des peuples.
Une Europe qui ne serait plus l’agent empressé d’une mondialisation sans règles ou le spectateur passif d’une crise qui frappe d’abord les régions et les populations les plus faibles.
Mai si la crise n’est pas seulement économique. Elle se double d’une crise de la société, et nous rappellerons nos valeurs, nos valeurs républicaines capables d’offrir à la jeunesse des règles et un idéal.
Un mot de notre stratégie
Je vous rappelle ceci.
Le retour à la France ne se divise pas, ne s’édulcore pas, ne se marchande pas.
Notre clarté, notre refus des étapismes hypocrites, notre radicalité, nous sont parfois reprochés.
Reprochés à tort.
En effet, notre stratégie est à la fois déterminée et sereine, mesurée et contrôlée.
Une ligne claire et nette (ce qui a presque toujours manqué au mouvement wallon) constitue une nécessité. Ce n’est pas un extrémisme.
Mes amis,
Notre fierté, c’est de ne pas être un parti « normal ».
Nous sommes au contraire un parti exceptionnel, un parti exceptionnel pour un temps exceptionnel.
Un temps qui postule pour nous un changement d’État et un changement de régime politique, ce qui n’est pas rien.
Et plus encore, un tempo qui doit conduire le peuple wallon à devenir une part de la nation française !
Nous sommes dans le temps d’une guerre politique.
Nos adversaires ne nous ménageront pas, ne nous faisons aucune illusion à cet égard.
Donc, pas d’équivoque quant à notre ligne !
La mission de notre Rassemblement, c’est d’organiser la résistance et de mener notre combat d’émancipation.
Notre responsabilité est immense car notre cause dépasse nos personnes.
Je vous le demande : sans le R.W.F., où en serait la perspective d’un autre avenir pour les Wallons et les Bruxellois ?
Sans le R.W.F., où en serait l’espérance du mouvement wallon ?
Sans le R.W.F., qui parlerait au nom du mouvement wallon ?
Oui, je vous le demande : sans le R.W.F., qui oserait annoncer qu’il faut refuser la capitulation et la colonisation, que la Wallonie peut échapper au repli suicidaire et à l’enfermement, que l’union avec la France sera l’union complémentaire de notre double identité : de notre identité régionale wallonne préservée et de notre identité nationale française retrouvée ?
Si nous gardons le cap, c’est en raison d’une très forte conviction, gage de notre unité et de notre durée.
Cette conviction, c’est qu’il n’y a pas de compromis possible avec la « België ».
C’est aussi qu’il n’y a pas de sens de l’Histoire qui serait écrit à l’avance.
Notre vision de l’Histoire humaine est « laïque », elle n’est pas soumise à une loi prétendument suprême, celle de la prédestination fatale et de l’immobilisme perpétuel.
La seule loi qui compte, c’est celle de la volonté politique des citoyens contre la fatalité.
Les valeurs républicaines sont les nôtres. C’est pourquoi la vraie citoyenneté est celle des libertés, des droits, des devoirs, mais aussi celle du pouvoir des individus de réussir à inverser le cours des choses.
L’Histoire de la Wallonie n’est pas finie ! Celles de Bruxelles non plus. Un jour prochain, elles trouveront une nouvelle dimension aux côtés de la France.
Avant de conclure, je veux souligner l’événement du jour et saluer l’élection de Laurent Brogniet à la direction du parti.
Pour nous, pour notre cause, Laurent est une chance !
Aidez-le, épargnez-le, respectez-le !
Laurent, nous avons appris à connaître tes qualités et tes capacités !
L’avenir démontrera que nous avons fait le bon choix, le meilleur choix.
Tu as toute ma confiance, toute notre confiance. Je suis heureux et fier de toi !
Cela dit, je reste totalement disponible, actif et engagé dans notre action collective.
Je veux aussi remercier tous les autres animateurs du parti, les vice-présidents, les responsables d’arrondissement et chacun(e) d’entre nous ici présent.
Merci de votre engagement, et aussi de la confiance que vous m’avez témoignée, comprenant bien pourquoi je me suis souvent montré exigeant, dans l’intérêt de notre cause et de l’image de notre Rassemblement.
Vous avez déjà obtenu des victoires.
Nos idées progressent…
Vous avez reconstruit la combativité et l’honneur du mouvement wallon.
Vous avez aussi appliqué cette sentence du général de Gaulle :
« Entre deux voies, il faut choisir la plus difficile, c’est la meilleure ! ».
Mes amis,
Nous avons choisi ensemble le beau risque du destin plutôt que les certitudes immédiates d’une carrière ou des apparences de pouvoir.
Notre certitude à nous est plus digne et plus haute, c’est celle d’atteindre un jour notre objectif final.
Alors, à ce moment, nous pourrons enfin proclamer :
Vive la Wallonie française !
Vive Bruxelles française !
Vive la France !
Illustration du début de l’article : Paul-Henry Gendebien. La raison et le coeur. Oui à la France. (Editions Mols, 2011).
Photo : Paul-Henry Gendebien et Laurent Brogniet