C’était en 2003. Le constitutionnaliste Francis Delpérée jugeait« exécrable » la volonté de réviser l’article 195 de la Constitution, cet article qui permet de modifier la Constitution.
La conclusion de Francis Delpérée était la suivante : « L’intention de réviser l’article 195 étend le procédé de manière institutionnelle. C’est exécrable. Ce n’est pas la négation de l’Etat de droit, c’est le déni de l’Etat constitutionnel. On pourra à l’avenir tout faire par des lois spéciales, rompant avec deux siècles au cours desquels tous les pouvoirs étaient exercés de la manière établie par la Constitution. Ce jour-là, je ferme la porte. On est en train de scier la branche sur laquelle on est assis. Il faut impérativement maintenir la distinction entre loi spéciale et Constitution. »
Ce n’est donc pas la première fois que la Constitution belge est, pour rester poli, malmenée. On se souvient en effet que le gouvernement Di Rupo avait tout simplement contourné l’article 195 de la Constitution qui désigne les articles révisables. En effet, avec ses comparses de l’époque (CDH, MR et ECOLO), il avait mis entre parenthèses ce fameux article 195 afin de faire passer à la dérobée la sixième Réforme de l’Etat.
La scission de BHV, par exemple, n’était pas soumise à révision en 2010 par le gouvernement Leterme démissionnaire. Mais huit partis en avaient décidé autrement : l’article 195 fut déclaré révisable « transitoirement » (sic). La Constitution était dès lors réduite à une simple loi spéciale !
A l’époque, Filip Reynjens, professeur de Droit et de Sciences politiques à l’université d’Anvers, n’hésita pas à parler de « scandale ».
Avec le chambardement du gouvernement Michel suite au départ de la N-VA, le parti le plus important de la « suédoise », Charles, le fils aîné de Louis, a décidé de se passer du vote de confiance du Parlement. Il s’agit pourtant d’un nouveau gouvernement qui, circonstance aggravante, est largement minoritaire et qui a annoncé des priorités politiques différentes de celles du précédent, comme le « climat » pour faire plaisir à Groen-ECOLO.
Parallèlement, il est probable que l’appui externe des députés N-VA se limitera peu ou prou au vote du budget afin de ne pas irriter le patronat flamand. Avant de se lancer au plus vite dans une campagne très dure sur les thèmes de l’immigration et du communautaire.
Les constitutionnalistes belges (comme Delpérée, Dumont et autres Behrendt) très souvent asservis à des partis ne savent pas très bien sur quel pied danser puisque le cas apparaît rarissime, voire unique dans l’histoire pourtant chahutée du royaume. Cette Constitution apparemment facile à contourner est-elle si difficile à interpréter rationnellement ?
Pourtant, selon le constitutionnaliste des Facultés Saint-Louis, Mathias El Berhoumi, « On est manifestement devant un nouveau gouvernement. Le départ de la N-VA, le plus gros parti de la coalition, constitue un changement majeur ».
Le R.W.F. est d’avis qu’un gouvernement largement minoritaire dont la coalition a changé de façon substantielle devrait faire une déclaration gouvernementale avant de recevoir éventuellement le feu vert du Parlement, organe représentatif « du peuple souverain ». Enfin, c’est la formule consacrée…