Discours de Paul-Henry Gendebien en… 2014 !
Les historiens du futur en conviendront un jour : le gouvernement Di Rupo, pour la Belgique, aura peut-être été comme la dernière cigarette du condamné ?
Comme un placebo, c’est-à-dire comme un médicament bidon !
En voulant sauver à tout prix la Belgique, ce gouvernement a délibérément sacrifié la Wallonie, son avenir économique, mais aussi sa mémoire collective et son destin.
Je ne crois pas qu’il a réussi à tuer la Wallonie, mais en tous cas, il a essayé !
Quant aux médias francophones, ils méritent eux aussi des remerciements des partis belgicains ; en réalité, nous avons affaire à une presse ministérielle, comme on le disait au 19ème siècle, époque où un certain nombre de journaux étaient déjà subsidiés par le pouvoir.
Oui, nous sommes confrontés à une presse ministérielle, toujours aux ordres, toujours oublieuse de ses devoirs, toujours ennemie de la cause wallonne.
Tous les jours, elle nous répète la même chanson, la même sotte chanson :
« La Belgique est sauvée ! » (Mgr Léonard l’avait annoncé…)
« C’est pire ailleurs ! »
« Remercions le ciel parce que nos footballeurs seraient invincibles et parce que nous sommes le seul pays au monde, avec Tahiti, à avoir trois reines. » (ndr : en 2014, Fabiola, Paola et Mathilde).
Cet immense bonheur, laisse-t-on entendre, nous le devrions à Elio Di Rupo.
C’est vrai puisque nos médias le disent !
Pour eux, pas de doute. M. Di Rupo est grand ! M. Di Rupo est grand parce qu’il a fait « don de sa personne » pour assurer la stabilité du pays !
Mensonge, double mensonge, triple mensonge !
D’abord, il n’y a pas ici de « pays ». Et il n’y a ni équilibre, ni stabilité, ni paix.
Non, il n’y a pas de pays belge. Il n’y a qu’une non-nation ! Il n’y a qu’un reliquat d’Etat, comme on dit qu’il y a les restes d’un repas.
Il n’y a qu’une assemblée provisoire de deux ou trois sociétés politiques. Il n’y a aucun apaisement communautaire, au contraire. […]
Dans tous les domaines, la domination flamande continue à faire la loi et la Wallonie se laisse rouler dans la farine.
Voyez la situation dans la haute administration, la diplomatie, l’armée, la Poste, Belgacom, la SNCB.
En vérité, nous sommes en face d’une combinaison dramatique de deux phénomènes (qui ne sont contradictoires qu’en apparence) : la décomposition de l’Etat central et la colonisation de la Wallonie.
Plus l’Etat central s’évapore et s’autodétruit, plus les élites wallonnes et bruxelloises recherchent la protection et la bienveillance de la Flandre !
Il y a là une sorte de trahison de nos élites politiques traditionnelles : elles se couchent, elles mettent le genou dans la boue, elles ont choisi la capitulation, c’est-à-dire la collaboration avec un régime qu’il faut bien qualifier de belgo-flamand et d’anti-wallon.
Un jour, les nationalistes flamands seront plus nombreux que les élus des partis traditionnels sur les bancs flamands du Parlement fédéral.
La superstructure de l’Etat sera plus lézardée et plus divisée que jamais. La crise pourrait être plus profonde et plus longue que celle de 2010-2011.
Elle pourrait concerner non seulement l’Etat fédéral, mais également la Région de Bruxelles-Capitale où un ministre pourrait frapper à la porte du gouvernement régional, avec toutes les conséquences que l’on peut déjà imaginer…
Vous pouvez en être convaincus, le spectacle affligeant de 2010-2011 va recommencer de plus belle !
Mais la reprise de la pièce ne sera pas un succès.
Quelle qu’en soit l’issue, la négociation d’après-élections conduira à une étape supplémentaire dans la déconstruction de l’Etat et dans l’appauvrissement de la Wallonie.
Après le 25 mai, les partis francophones pousseront d’abord quelques cris d’orfraie indignée en découvrant les résultats du scrutin en Flandre.
Ensuite, comme toujours, ils finiront par se mettre à table, d’abord en maugréant et puis avec appétit. Ils feront de nouvelles concessions à la Flandre. Avec entrain. Comme un troupeau d’oies idiotes qui acceptent d’assister à un congrès de charcutiers.
Mais ils seront confrontés à un cruel dilemme : ou bien, ils refusent la N-VA au gouvernement et dans ce cas ils se mettent à dos la Flandre profonde et provoquent une tempête encore plus violente. Ou bien, ils acceptent le fait nationaliste et gouvernent avec la N-VA : dans ce cas, ils font entrer le loup dans la bergerie et ils accélèrent la décomposition de leur chère Belgique.
Nous sommes devant deux sociétés politiques, deux centres de gravité politico-idéologique : une Flandre à droite, une Wallonie au centre gauche.
Je crois que ce PS affaibli, ne pourra pas tenir à la fois sur deux fronts : le front institutionnel et le front économico-social.
En tout état de cause, les partis francophones vont payer très cher leur aveuglement, leur servilité, leur absence d’anticipation.
C’est clair : nous sommes, plus que jamais, devant l’échec fatal du fédéralisme belge.
En 2012, le New York Times évoquait la disparition possible ou probable d’une dizaine d’Etats fragiles dans le monde. Parmi eux : la Belgique ! si ce n’est encore fait, c’est à cause de Bruxelles.
Mais ce n’est qu’une question de temps.
Les autruches ministérielles continuent, quant à elles, à s’enfoncer la tête dans le sable.
Mme Milquet, au moment même où le « New York Times » publiait son article nous déclarait benoitement (c’était en 2012) : « Nous avons réussi à pacifier le pays ! ».
Le drame, c’est qu’elle semble croire ses propres bêtises…
Jusqu’où iront les partis francophones officiels ?
Ce qui est certain, c’est que l’on va toujours trop loin quand on ne sait pas où l’on va.
Les Di Rupo et Magnette, Milquet et Lutgen, Reynders et Michel, sont des gestionnaires de l’immédiat, des administrateurs du provisoire. Ils ne savent pas où ils vont. Leur horizon est à courte vue. Ce ne sont pas des hommes d’Etat, ce sont des hommes d’hier, pas de demain. Les Flamands, eux, savent où ils vont. Et nous ici, nous le savons.
Comme les Catalans, les Ecossais, ils vont à l’indépendance (ndr : via le confédéralisme dans un premier temps), c’est-à-dire l’Etat flamand.
Il y a quelques mois, la pauvre « Libre Belgique » qui n’ose plus utiliser son nom et s’appelle désormais « La Libre » (sans doute par dérision) se félicitait du fait que le CD&V avait déclaré qu’il voulait un « confédéralisme positif ».
Selon « La Libre », c’était une victoire du bon sens, un signal, une victoire déjà, une merveille, la 8ème merveille du monde. Et elle demandait à ses lecteurs de s’en féliciter eux aussi !
Pauvres belgicistes ! on finira par avoir pitié d’eux ! Ils ne cessent de scier la branche vermoulue sur laquelle ils sont assis.
N’en déplaise à Elio et à Joëlle, n’en déplaise aux médias francophones, la Belgique n’est ni stabilisée ni pacifiée.
Elle ne l’est pas sur le terrain institutionnel. Mais en outre son économie et ses finances sont en mauvais état.
La dette est à nouveau à 102% du PIB. Sous Di Rupo, elle a augmenté de 30 milliards d’euros. Et le corps social souffre. Le chômage est énorme (ndr : le chômage a baissé dans les chiffres, mais de nombreux allocataires sont passés au CPAS). En Wallonie, il est à 18% : deux fois et demi plus élevé qu’en Flandre. La pauvreté est catastrophique.
Selon l’IWEPS, sur 200 régions européennes, la Flandre se classe 22ème, la Wallonie 145ème et Bruxelles 189ème.
Quant au solde à financer pour 2013, il était de 253 millions d’euros alors que l’objectif annoncé était de 110 millions. Et le reste est à l’avenant.
Lorsque nous disons que le bilan du fédéralisme belge est désastreux pour la Wallonie, nous ne faisons que tirer les conclusions des analyses des économistes.
Il faut bien l’admettre : la désindustrialisation de la Wallonie se poursuit, en liaison évidente avec la politique d’austérité vendue par l’Europe et la politique de l’euro surévalué imposé par la BCE (Banque centrale européenne), c’est-à-dire par l’Allemagne. Cette politique, elle a été ratifiée et appliquée par le gouvernement Di Rupo-Reynders-Milquet.
Ce qui n’empêche pas ces messieurs – au contraire – de proclamer leur adoration pour une Europe qui est la seule zone du monde où la croissance est aussi faible, où la déflation régressive menace, où la mondialisation incontrôlée déstructure une partie de notre tissu industriel et provoque des délocalisations.
La Wallonie est confrontée à quatre crises simultanément :
– crise économique et financière internationale
– crise de l’Etat providence
– crise de l’Europe dépourvue de champ de vision et de leadership
– crise institutionnelle et existentielle de l’Etat belge
Devant cette perspective, la malheureuse Wallonie aurait besoin d’un Etat :
– solide
– protecteur
– solidaire
– respecté
N’ayons pas peur des mots !
La Wallonie aurait besoin d’une volonté, celle d’un Etat démocratique, social et républicain, d’un Etat digne de ce nom !
Cet Etat, il existe ! Mais ce n’est pas l’impossible Etat wallon !
C’est le seul qui est disponible. Il est à portée de la main. Il est à côté de nous.
Vous m’avez compris. J’ai naturellement parlé de la France et, avec ce même nom, j’ai parlé de la République, car la France et la République ne font qu’un. Elles ne sont qu’une même identité, une même réalité !
Et cette France, comme le proclamait de Gaulle, elle n’est évidemment ni de gauche ni de droite. Mais elle les rassemble en les surpassant.
Ainsi, elle reste elle-même, à travers l’Histoire, à travers ses faux reculs, à travers ses rebonds et ses sursauts.
Prenons-la toute entière !
Respectons-la !
Aimons-la !
Je vous le demande : soyons-lui fidèles, car la France elle-même est fidélité… Soyons-lui fidèles même s’il peut arriver qu’elle nous déçoive en ceci ou en cela.
Oui, la France, celle que nous aimons, est fidèle à ses vraies traditions, à ses idéaux, à ses valeurs.
Ses dirigeants passent, ses régimes passent, ses numéros de République se succèdent, mais elle est toujours à sa place, unique en Europe et irremplaçable.
A travers tout et malgré tout, la France demeure, la République résiste.
Aujourd’hui, voici la Wallonie démoralisée, la Wallonie niée, la Wallonie belgifiée.
Il n’est pas mort notre héritage collectif, industriel, agricole, artisanal, novateur, scientifique, performant, artistique…
Il renaîtra. Mais il reste à l’épanouir dans un cadre convenable. Aussi, notre mission n’est pas terminée !
Depuis 15 ans, nous avons annoncé la bonne et grande vérité : la fin de la Belgique, ce n’est pas l’orphelinat pour la Wallonie
Vous le savez tous ; il y a une maison de famille prête à s’ouvrir pour le peuple wallon.
Continuons à le proclamer car les échéances approchent. L’heure de vérité sera bientôt là !
La Wallonie avec la France : 33 propositions concrètes (campagne électorale 2014)